Cet article fait partie de notre guide: Tout comprendre sur l’évolution du process mining

Process Mining : Celonis affiche de fortes ambitions en France

Celonis, licorne munichoise valorisée à 11 milliards, a de fortes ambitions. Après un an de présence en France, le spécialiste du process mining compte bien convaincre les grands comptes et les ETI des qualités de sa plateforme.

Spécialiste du process mining, l’Allemand Celonis a fêté ses dix ans d’existence cette année. Cependant, son bureau français n’a ouvert que depuis un an. À la tête de cette division, les dirigeants de l’éditeur ont nommé Fadi Naffah. Le directeur général France et MEA a passé près de quatre ans dans les rangs du comité exécutif de SAP France. « J’ai également dirigé Salesforce en France pendant six ans et Citrix en France pendant 10 ans », précise-t-il en guise d’introduction. 

Pour lui, la mission de Celonis n’est pas de vendre un outil de process mining mais de permettre aux entreprises « d’accomplir leur vision stratégique ».

« Pour moi, le plus important n’est pas le marché du process mining en tant que tel. Le process mining n’est qu’un outil ou une technologie », assure Fadi Naffah.  

Le discours semble rôdé, maintes fois entendu aussi. Mais le responsable veut faire valoir quelques arguments en faveur de Celonis. 

« Les entreprises ont investi beaucoup d’argent pour la numérisation de leur front et de leur back-office. Je suis bien placé pour le savoir par mes [anciennes] fonctions chez Salesforce ou chez SAP », affirme Fadi Naffah. « Ce n’est pas pour autant qu’ils pensent être à niveau afin de faire face à l’ensemble des défis qui se présentent à eux aujourd’hui » 

Pour mettre en œuvre leurs visions stratégiques, Fadi Naffah est convaincu que « les entreprises doivent comprendre leur processus de bout en bout ».

Le process mining, un outil pour résorber la dette technique

Le problème viendrait de la dette informatique des clients. « Ce n’est la faute de personne : ils ont acheté beaucoup de SAP, d’Oracle, du ServiceNow, etc. ». Et comme les processus traversent plusieurs systèmes d’information, « cela rend leur exécution compliquée, provoquant une inefficience qui empêche les entreprises d’accélérer la transformation de leurs activités ». 

En ce sens, le process mining doit offrir des recommandations et « une approche d’exécution intelligente à travers les données […] Il y a trois phases importantes : nous allons découvrir les problèmes avec les données, puis nous allons en analyser les causes profondes, avant de fournir des recommandations », résume le dirigeant. 

Celonis n’est pas le seul à se placer sur ce secteur. Si une myriade d’acteurs de petite taille a été rachetée par IBM, SAP, Appian ou encore UiPath, Celonis est parfois mis en concurrence avec ABBYY. Cela n’inquiète pas le directeur France. « Selon les analystes, nous détenons aujourd’hui plus de 60 % du marché du process mining ou de l’Execution Management System ».

Cette terminologie d’Execution management system refléterait selon lui « le positionnement unique de Celonis sur le marché » 

Celonis revendique actuellement plus de 2 000 clients, dont « la moitié aux États-Unis et l’autre en Europe » et l’éditeur intervient « sur les quatre pans stratégiques que sont la relation client, le support finance – y compris les achats –, la supply chain et la production », affirme Fadi Naffah. 

L’autre facteur important, toujours selon le dirigeant, serait l’élasticité de la plateforme. « Par exemple, tous les processus de Siemens sont traités à travers la plateforme de Celonis. Je vous laisse imaginer le nombre de processus et le volume de données que notre plateforme est capable d’analyser [chez ce client] et toutes les recommandations que nous sommes capables d’apporter sur l’ensemble de [ses] processus ». 

Les cas d’usage les plus répandus de Celonis en Europe

Siemens est un client historique et un partenaire commercial de Celonis, quid des clients français ?

Selon le directeur général France, les cas d’usage les plus répandus concernent la finance, mais les entreprises souhaitent aussi améliorer la relation client et la supply chain. « Nous retrouvons les analyses des processus de paiement des fournisseurs et de recouvrement, le record to report, de processus d’achat, le fameux procure to pay », liste-t-il.

I-BP, société informatique de la Banque Populaire, et Natixis Payment gèrent par exemple les processus bancaires en utilisant Celonis. Natixis Payment, filiale de la BPCE, administre ainsi la contestation des paiements en temps réel sur un parc de 24 millions de cartes bancaires et près de 9 milliards de transactions par an. « Natixis a amélioré de 20 % l’efficacité de ce processus. Ils avaient tout testé avant, jamais il n’avait obtenu de tel résultat », se réjouit le directeur général France.

Concernant la relation client, les entreprises souhaitent augmenter leur Net Promoter Score et leur visibilité sur le Web. « Nous travaillons beaucoup également sur le processus order to cash qui est le processus régalien des entreprises. C’est là où le bât blesse parce que ce processus passe par plusieurs systèmes d’information. Celonis peut se connecter à l’ensemble des systèmes sous-jacents pour retracer ce processus de bout en bout et comprendre où se trouve le problème ».

Le dirigeant évoque également des clients qui cherchent à améliorer l’order management au niveau de la supply chain. « Nous travaillons beaucoup avec Airbus et Arkema sur ces sujets ». Alstom et Orange ont également témoigné sur ce sujet lors de la session française du Celonis World Tour.

Le process mining peut également servir à élaborer des jumeaux numériques, ce que fait Porsche dans le cadre de la production de sa fameuse 911. 

L’autre grand volet des activités de Celonis est la préparation à la migration des SI vers le cloud ou vers de nouvelles versions de progiciels d’envergure. « Schlumberger, par exemple, a économisé près de 40 millions d’euros dans la migration de leur système d’information avec Celonis », affirme Fadi Naffah.

Process mining en temps réel

Une des promesses de Celonis est aussi de faire du process mining en temps réel.

Ce type d’outils est historiquement utilisé en amont ou en aval de l’optimisation d’un processus ou d’un système. D’où la question : le process mining en temps réel est-il bien réaliste ?

« Tout dépend de l’industrie et du processus », répond le DG France. « Quand les banques font du trading, le temps réel est stratégique. De la même manière, le temps réel est important dans la détection du blanchiment d’argent ou de la fraude, dans l’attribution de crédits pour ne pas perdre la relation avec le client. Sur d’autres processus, on peut se permettre quelques jours de décalage, notamment quand il s’agit de faire des prévisions de vente ».

Quoi qu’il en soit, Celonis propose un moyen pour ingérer des données en temps réel via son Replication Cockpit. Celui-ci comprend une centaine de connecteurs vers différents systèmes, dont les grands ERP et CRM du marché. Il est également possible de créer son propre connecteur pour tout logiciel capable de communiquer via API REST.

Reste que la question de l’actualisation des données n’est pas si simple suivant les cas d’usage, notamment quand l’outil est utilisé pour migrer de SAP ECC vers S/4HANA. Certains attributs de tables changent entre les deux systèmes. Pourtant, il est intéressant de comparer des processus et le comportement de ces systèmes quand ils existent en parallèle, tant que l’ERP d’origine n’est pas décommissionné. Cela doit permettre de vérifier si S/4HANA répond effectivement à ses promesses.

Celonis vs Signavio

Par ses origines et son activité, Celonis est souvent associé à SAP, non seulement pour optimiser les processus des entreprises qui passent par ECC ou S/4HANA, mais également pour réaliser les migrations entre ces systèmes.

Pourtant, SAP a acquis Signavio dans le même but : préparer ces chantiers d’envergure. 

« Quand un client veut travailler sur une approche transformationnelle de son activité, il ne veut pas utiliser un outil qui ne fonctionne qu’avec SAP, Salesforce ou autre. Il veut un outil qui fonctionne sur l’ensemble de ces progiciels, voire sur ses outils développés en interne », défend Fadi Naffah.  

« Nos clients témoignent de gains énormes. Rien que sur le processus achat, Deutsche Telekom gagne 70 millions d’euros par an et Deutsche Telekom n’a pas que du SAP », illustre-t-il. 

« Avec tout le respect que je porte pour SAP, aucun client ne me dit vouloir travailler avec Signavio », continue le dirigeant. « Même sur la migration, Signavio a très peu d’expérience. Environ 70 % des clients SAP dans le monde qui migrent vers le cloud emploient Celonis ! ».

De fait, l’USF confirme au MagIT que la majorité de ses adhérents avait fait le choix d’autres solutions de process mining, dont Celonis, et que le rachat de Signavio par SAP a créé une certaine confusion dans ses rangs.

En France, une croissance « à trois chiffres »

Aujourd’hui, la division française de Celonis compte une cinquantaine de collaborateurs. L’édition française du World tour aurait réuni 2 000 participants. « Je n’ai jamais vu une évangélisation aussi rapide en trente ans de carrière », se réjouit Fadi Naffah.

Cependant, le niveau de maturité des entreprises par rapport à la notion de process mining différerait encore grandement. « Il y a des entreprises qui ne nous connaissent pas et qui partent de zéro. D’autres veulent comprendre les véritables différences entre BPO, RPA et process mining. Nous sommes toujours dans une phase d’évangélisation », constate le DG. 

Le fait que Celonis se soit rapproché de gros intégrateurs, tels Accenture et IBM, ainsi que de cabinets de conseil – qui, selon Fadi Naffah, « utilisent tous Celonis en interne » –, permettrait toutefois d’améliorer cette reconnaissance. 

« Notre stratégie est d’adresser les grands comptes à l’aide de partenaires stratégiques afin de travailler sur l’ensemble de leur processus. Nous avons une trentaine de grands clients en France : L’Oréal, Airbus, BPCE, Arkema, Engie, EDF, etc. », vante-t-il. Certains ont opté pour la plateforme avant l’arrivée de l’éditeur en France. Par exemple, Airbus a opté pour la solution en 2015. Ce qui ferait de l’avionneur un des premiers clients de Celonis en France.

Par ailleurs, Celonis cible aussi les entreprises qui réalisent entre 300 millions et 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires. « Nous travaillons avec ces acteurs par le biais des partenaires pour cibler des problématiques bien identifiées, mais moins complexes que celles des grands comptes ».

Le partenariat d’envergure avec ServiceNow concernant l’optimisation des processus « ITSM et RH, principalement » devrait également attirer de nouveaux venus. « La pénétration de ServiceNow sur les marchés européens et américains est exceptionnelle », lance Fadi Naffah. « En France, les retours des clients et des prospects sont assez encourageants au sujet de ce partenariat ». 

De plus en plus de clients s’adresseraient aussi directement à l’équipe française de l’éditeur. 

« Nous avons une croissance à trois chiffres en France. Nous allons y doubler notre nombre d’employés et nous avons un plan pour créer plus de 15000 emplois dans le pays. »
Fadi NaffahDirecteur général France et MEA, Celonis

« Il y a du bouche-à-oreille. Les clients discutent entre eux et nous favorisons ces dialogues. Chez Celonis, que ce soit en temps, en productivité ou en économie, nous apportons de la valeur. Et les clients témoignent ! », lance le directeur général. 

La popularité croissante de Celonis en France se refléterait déjà dans ses résultats financiers

« Nous avons une croissance à trois chiffres en France. Nous allons y doubler notre nombre d’employés et nous avons un plan pour créer plus de 15 000 emplois dans le pays autour des technologies de Celonis, dans les trois ans à venir ».

Celonis souhaite ainsi favoriser le recrutement et la formation de consultants, de data scientists, de business analysts « chez nous, chez nos partenaires, et chez nos clients », précise Fadi Naffah.

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