L’absence totale de femmes dans une vidéo est davantage considérée comme anormale, mais cela n’empêche pas les youtubeurs masculins de continuer à en proposer.

Où sont les femmes sur YouTube ? Pas en tête du classement des vidéastes français·es les plus suivis, où s’est hissé ce week-end Tibo InShape (ça ne veut pas dire qu’il y est le plus regardé). Pas non plus dans les programmes proposés pour le grand retour de Squeezie. Le célèbre vidéaste a récemment partagé une bande-annonce pour ses futures vidéos, très attendues après une pause de plusieurs mois. Quelques personnes, surtout des femmes, ont remarqué qu’on n’y voyait que des hommes. Elles ont tout de suite été sanctionnées par un déluge d’insultes. 

Ces évènements ont inspiré une lettre ouverte de plusieurs militantes féministes et artistes à l’intention de Squeezie, partagée sur le site de CausetteElles y soulignent que le youtubeur avait promis de faire des efforts après le harcèlement d’une participante du GP Explorer 2. « Nous pensons que tu as les moyens financiers et humains de passer à l’étape suivante », écrivent-elles. « Du positionnement à l’exécution d’une stratégie d’inclusion, en confiant aux équipes qui gèrent ta stratégie éditoriale la mission d’identifier des leviers pour sortir de ce cercle infini d’entre-soi masculin sur YouTube. »

Le symbole est morose. Le sujet du manque de diversité dans les contenus vidéos en ligne (sur YouTube ou Twitch) a beau être débattu depuis de nombreuses années, on a l’impression d’avoir très peu avancé en la matière. L’une des principales organisations françaises de défense des créatrices en ligne, Les Internettes, a d’ailleurs annoncé sa dissolution en mars, après huit ans d’existence, par manque de temps et « de reconnaissance des institutions, de la presse et du public ».

Cet édito est extrait de la newsletter Règle 30 par Lucie Ronfaut, envoyée chaque mercredi à 11h. Pour vous abonner :

La priorité est toujours de grossir, jamais de faire parler des meufs

Comme le souligne Marie Camier Théron, l’une des co-fondatrices de l’association, des « belles victoires » ont quand même été gagnées. Longtemps, le sujet des femmes sur YouTube était vu par le petit bout de la lorgnette : leur autocensure supposée, les violences qu’elles subissent. Toutes ces réflexions sont utiles, mais elles ont aussi nourri un certain sentiment de fatalisme. Le problème, c’est qu’il n’y a pas assez de femmes populaires sur YouTube. C’est le reflet de notre société sexiste. C’est un écosystème précaire, où la priorité est toujours de grossir, jamais de faire parler des meufs. C’est complexe. Ce n’est la faute de personne. 

Heureusement, les discours changent petit à petit. L’absence totale de femmes dans une vidéo est davantage considérée comme anormale. La présence d’une seule d’entre elles, parmi une marée d’hommes, ne satisfait pas non plus. Surtout, une réflexion plus nuancée s’est mise en marche, à l’image du travail précieux de la vidéaste Lapeint, qui a réalisé une étude approfondie des contenus des dix chaînes YouTube françaises les plus vues (on y apprend par exemple que Tibo InShape, malgré sa réputation sulfureuse, fait bien mieux que les autres sur le nombre de femmes qui interviennent sur sa chaîne). 

Au final, c’est la faute, ou au moins la responsabilité, de pas mal de monde. Ce sont les youtubeurs qui ne détestent pas forcément les femmes, mais qui ne pensent pas forcément à elles non plus. Ce sont des formats populaires qui n’évoluent jamais, et qui fonctionnement seulement avec une bande de potes qui se connaissent bien (sur ce sujet en particulier, je vous recommande cette analyse intéressante de la vidéaste Aléa+). Ce sont les boîtes de production qui n’embauchent pas de femmes devant et derrière la caméra. Car il ne suffit pas de nous écouter, il faut aussi, à un moment, nous payer. Voilà au moins ce qu’on a gagné ces dix dernières années, grâce au travail acharné des militantes féministes et des vidéastes : on détruit les bonnes excuses. Le problème n’est pas si complexe. Il est même bête et méchant. 

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