La SNCF mène des expérimentations sur la vidéosurveillance algorithmique (VSA) dans trois gares, à Paris et Marseille. Les tests ont déclenché une action de La Quadrature du Net devant la Cnil, avec l’espoir d’y mettre fin.

La Quadrature du Net ne laissera pas la vidéosurveillance algorithmique (VSA) se propager en France sans rien faire. La preuve : l’association spécialisée dans le droit numérique a annoncé jeudi 2 mai 2024 une action devant la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil). Sa cible ? Des tests menés par la SNCF dans trois gares.

Ce que combat La Quadrature du Net, c’est un programme nommé Prevent PCP. L’objectif du projet est de développer des solutions techniques pour détecter des objets délaissés dans les gares — comme des bagages — et rechercher leurs propriétaires. Pour cela, la SNCF mobilise ses caméras de vidéosurveillance, déjà déployées dans ses espaces.

Actuellement, l’expérimentation que l’association française attaque se passe dans trois gares, deux à Paris, une à Marseille :

  • la gare du Nord à Paris, du 12 février au 30 août 2024 (100 caméras),
  • la gare de Lyon à Paris, du 27 mars au 30 août 2024 (70 caméras),
  • la gare Saint-Charles à Marseille, du 15 avril au 30 août 2024 (87 caméras).

D’après la SNCF, le test est restreint : « aucune donnée biométrique ne sera traitée durant cette expérimentation », est-il annoncé. Les images provenant de la vidéosurveillance seront analysées et conservées dans une fenêtre maximale de 14 jours, avant d’être effacées. Surtout, c’est un test technique ; il n’y a pas d’usage opérationnel de Prevent PCP.

Désaccord sur ce qui relève de la biométrie

Mais La Quadrature est en désaccord avec la société ferroviaire. Sa plainte relève que « pourront être qualifiés de biométriques un vêtement ou accessoire porté par la personne à un instant t, un geste, une expression d’émotion, une direction de déplacement, une position dans l’espace et le temps (assis, debout, statique, allure de la marche, etc.) ».

En clair, la vidéosurveillance algorithmique ne va pas impliquer de la reconnaissance faciale. Cependant, d’autres formes d’identification sont à garder à l’œil. Et, compte tenu des intentions du projet Prevent PCP, il y a de fait un mécanisme reposant sur l’identification et le suivi des propriétaires des bagages, pointe l’association.

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Souriez, vous êtes vidéosurveillés algorithimiquement . // Source : Skitter

Aujourd’hui, ce test est « sans impact pour les personnes », pointe la SNCF. « Les alertes de détection ne seront pas traitées opérationnellement en temps réel et ne serviront qu’a posteriori pour le calcul des indicateurs de performances », est-il détaillé. Mais, La Quadrature du Net pense surtout à l’après, si le test donne satisfaction.

L’association argue que trois conditions sont nécessaires pour qualifier un dispositif de traitement de données biométriques : il faut un traitement spécifique, une analyse des caractéristiques physiques, physiologiques ou comportementales des personnes, et, enfin, une identification unique de ces personnes.

Telle sera la problématique que devra trancher la Cnil, en première ligne sur les sujets de traitement de données personnelles. Pour La Quadrature, c’est tout vu : il faut non seulement forcer la SNCF à arrêter cette initiative, mais il faut aussi la punir. Elle devra aussi ne plus utiliser le dispositif et supprimer toutes les données personnelles déjà collectées.

La vidéosurveillance algorithmique avance

À travers cette démarche, l’association entend aussi « dénoncer l’hypocrisie des promoteurs de la VSA » et aussi secouer la Cnil, dont « l’incurie » est pointée du doigt. « Elle laisse proliférer des projets illégaux de VSA tout en accompagnant le processus de légalisation », s’agace l’association, au lieu de tenir son rang d’autorité de protection.

Les caméras de sécurité sont des objets connectés vulnérables. // Source : Unsplash
Les caméras de sécurité, auxiliaires de la VSA. // Source : Unsplash

La vive irritation de La Quadrature du Net s’inscrit dans une dynamique qui préoccupe l’association, justement. La VSA tend effectivement à s’étendre, sous l’ombrelle fort commode des Jeux olympiques et des besoins de sécurisation de l’espace public. D’autres tests ont déjà été lancés, en mars et en avril, pour des concerts ou des matchs.

C’est dans le cadre de la loi relative aux JO du 19 mai 2023 que la VSA a été approuvée. En théorie, la vidéosurveillance algorithmique est exploitée « à titre expérimental » et il n’est pas prévu de l’étendre au-delà du 31 mars 2025 (les jeux se seront achevés bien avant, le 8 septembre 2024). Mais en matière de sécurité, le provisoire a tendance à durer.

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