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Législatives 2024 : une trentaine de candidats RN annulent ou refusent les débats sur France Bleu avant le second tour

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  • France Bleu

Une trentaine de candidats Rassemblement national, en lice au second tour des élections législatives anticipées, ont annulé leur présence aux débats proposés par différentes rédactions de France Bleu. Le service presse du RN assure qu'il n'y a eu aucune directive du parti d'extrême droite.

Nadine Lechon, Daniel Grenon ou encore Mylène Wunsch ont refusé ou annulé le débat de l'antenne France Bleu dans leur département Nadine Lechon, Daniel Grenon ou encore Mylène Wunsch ont refusé ou annulé le débat de l'antenne France Bleu dans leur département
Nadine Lechon, Daniel Grenon ou encore Mylène Wunsch ont refusé ou annulé le débat de l'antenne France Bleu dans leur département © Radio France - Marie-Astrid Guégan / Nicolas Fillon / Manon Klein

Le RN et ses alliés sont arrivés en tête du premier tour des élections législatives dimanche 30 juin, avec un peu plus de 33% des voix. Le parti d'extrême droite et ses alliés se sont qualifiés dans 485 circonscriptions sur 577, un record. À l'approche du second tour le 7 juillet, les rédactions de France Bleu avaient prévu d'organiser des débats pour que les candidats toujours en lice confrontent leurs idées.

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Mais plusieurs candidats qualifiés du Rassemblement national ont refusé de participer aux débats organisés par différentes stations locales de France Bleu. Certains de ces candidats ont même annulé après avoir pourtant donné leur accord. Selon le comptage de France Bleu, au moins 31 candidats RN sont concernés.

Des problèmes d'agenda, des empêchements de dernière minute

France Bleu Gascogne ne peut pas organiser de débats, car aucun candidat RN ne souhaite y participer. La radio publique locale, basée dans les Landes, avait notamment convié Véronique Fossey qui a refusé le débat d'emblée, et ce même avant le premier tour. Comme dans beaucoup de rédactions de France Bleu, les candidats sont mis au courant d'un débat d'entre-deux-tours avant le premier tour pour que ces derniers s'organisent et puissent être présents en cas de qualification.

La candidate de la première circonscription a d'abord évoqué un problème d'agenda puis elle l'a justifié par son refus de débattre avec Geneviève Darrieussecq (Ensemble), ancienne maire de Mont-de-Marsan et ministre. Selon Véronique Fossey, elle passe son temps à la dénigrer. Dans le même département, Ludovic Biesbrouck a aussi mis en avant un manque de temps. En Alsace, France Bleu et France 3, qui organisent des débats communs, ont sollicité sept candidats RN pour le débat du second tour. Quatre d'entre eux ont refusé. Parmi eux, Marion Wilhem s'est dite trop occupée avec son travail.

En Indre-et-Loire, Corine Fougeron a expliqué avoir une réunion commission de propagande en préfecture ce mardi soir qui l'empêchait d'être à l'heure dans les studios. La candidate RN a annulé par SMS au dernier moment ce mardi un peu avant 14h. Elle avait pourtant dit oui à France Bleu Touraine la veille. France Bleu Occitanie a aussi essuyé un refus ce lundi soir à 20h. Caroline Beout, dans la 9e circonscription de la Haute-Garonne, a d'abord accepté puis a annulé à cause d'un "empêchement de dernière minute".

Michèle Martinez, candidate RN et députée sortante sur la 4e circonscription des Pyrénées-Orientales, a finalement dit non à France Bleu Roussillon. Elle a indiqué que son planning était trop chargé pour se rendre en studio lors de la matinale mercredi ou un autre jour. Hanane Mansouri (LR-RN), dans la 8e circonscription de l'Isère, a d'abord dit "peut-être", avant de se désister, mais sans donner de raison : "Je ne souhaite pas participer au débat finalement" a-t-elle répondu par SMS à la rédaction de France Bleu Isère. Le candidat de la 2e circonscription, Édouard Robert, a aussi refusé.

Michèle Martinez députée sortante des Pyrénées-Orientales
Michèle Martinez députée sortante des Pyrénées-Orientales © Maxppp - PHOTOPQR/L'INDEPENDANT

En Bretagne, Jean-Yves Le Boulanger, candidat RN de la 5e circonscription des Côtes-d'Armor, a annulé sa participation au débat prévu sur France Bleu Breizh Izel au tout dernier moment pour "raisons personnelles". Annulation alors que sont ressortis ce mercredi sur les réseaux sociaux des propos qu'il a tenus il y a 15 jours lors d'une interview sur Bretagne 5. Le candidat se défendait d'être un "facho", indiquant qu'après avoir été béni par "un curé de couleur" lors d'un rassemblement de motards, il ne l'a "pas écrasé avec sa moto".

En Dordogne, la candidate du RN Dominique Marchaudon dans la 4e circonscription indique, elle, que le débat avec le candidat du Nouveau Front populaire "ne lui apporte rien" et que "La France et les Français n'ont pas de temps à perdre". La candidate du Rassemblement National sur le Périgord Noir explique à France Bleu Périgord qu'elle est "très occupée auprès des agriculteurs". Le député sortant ne s'est jamais présenté dans nos studios pour participer à l'échange en direct ni a prévenu de son absence. À 10 heures mercredi matin, dans un message écrit, le candidat et député sortant évoque "un emploi du temps chargé". Daniel Grenon, député sortant dans l'Yonne, ne s'est jamais présenté au débat organisé par France Bleu Auxerre mercredi et n'a pas prévenu de son absence. Dans un message, le candidat RN évoque "un emploi du temps chargé". Ce dernier est notamment accusé de racisme après avoir tenu des propos polémique dans le journal La Nouvelle République. En Haute-Vienne, Sabrina Minguet, candidate RN dans la 2e circonscription, a refusé le débat organisé dans les studios de France Bleu Limousin. Elle a invoqué des raisons d’organisation personnelle.

Les adversaires politiques pointés du doigt

Des candidats ont aussi refusé catégoriquement de débattre avec leurs adversaires politiques. Dans la 2e circonscription de la Charente-Maritime, Karen Bertholom a décidé de ne plus débattre dans les studios de France Bleu La Rochelle avec Benoit Biteau. Son équipe pointe du doigt la pression exercée, notamment par les supporters du candidat de gauche, contre la candidate Renaissance, arrivée troisième, pour qu'elle se retire afin de faire barrage à l'extrême droite.

Marc Siffert, dans l'Indre, ne débattra pas non plus avec son adversaire LR sur France Bleu Berry. Il l'accuse de "faire de la politique politicienne" et d'avoir "négocié une alliance" avec le candidat du Nouveau Front populaire pour qu'il se désiste.

Sa collègue Mylène Wunsch a aussi dit non. Elle accuse le député sortant, François Jolivet, de n'aborder que des sujets locaux quand l'élection porte sur des enjeux nationaux.

Dans les Landes, Sylvie Franceschini a décliné l'invitation de France Bleu Gascogne ce mardi. "Je ne souhaite pas perdre mon temps à répondre à des attaques dénigrantes", a-t-elle répondu à la rédaction alors qu'elle devait faire face au député sortant de la 3e circonscription, le socialiste Boris Vallaud. La députée sortante Sophie Blanc, dans les Pyrénées-Orientales, a annoncé à France Bleu Roussillon qu'elle ne souhaitait pas débattre avec le candidat insoumis. Dans le Périgord aussi, une candidate du RN refuse de débattre, pointant du doigt son adversaire LFI. Nadine Lechon, arrivée en tête sur la première circonscription, celle de Périgueux, ne veut pas se retrouver face à Pascale Martin à cause "des idées haineuses de ce parti [LFI] qui encourage la mort des forces de l'ordre lors des manifestations" , dit-elle à France Bleu Périgord.

Sophie Blanc, députée sortante des Pyrénées-Orientales
Sophie Blanc, députée sortante des Pyrénées-Orientales © Maxppp - Nicolas Parent/PHOTOPQR/L'INDEPENDANT

Anthony Zeller, de la 6e circonscription du Loiret, a expliqué qu'il n'avait "aucune envie de débattre face à Richard Ramos", le député sortant du MoDem. Ce dernier a porté plainte contre le suppléant du candidat RN après des propos sexistes et antisémites sur les réseaux sociaux. Jean-Lin Lacapelle, toujours dans le Loiret, ne voit aucun intérêt à faire un débat dans lequel il se fera "traiter de parachuté et de pro-Poutine". Une référence à un article de France Bleu Orléans qui rappelait son passé pro-russe.

Jean-Lin Lacapelle en mai 2024
Jean-Lin Lacapelle en mai 2024 © AFP - QUENTIN TOP / HANS LUCAS

Certains candidats se disent malades

Plusieurs candidats se sont également déclarés souffrants auprès de rédactions de France Bleu. Élodie Babin, candidate dans la 2e circonscription du Loiret, n'a longtemps pas répondu aux appels de France Bleu Orléans. C'est son compagnon qui a finalement envoyé un message vocal à la rédaction dans lequel il a indiqué qu'Élodie Babin était malade du Covid. Par ailleurs, personne n'a vu la candidate depuis la dissolution de l'Assemblée nationale, note la rédaction, pas même les cadres du RN dans le Loiret.

Même motif invoqué pour Dorothée Champeau, candidate RN dans la 1ère circonscription des Deux-Sèvres. La rédaction de France Bleu Poitou a appris ce mercredi matin qu'elle annulait sa participation au débat prévu jeudi matin, en raison du Covid. La candidate est accusée d'avoir tenu des propos racistes dans une interview accordée à la Nouvelle République. "Beaucoup croient que tous les noirs vont rentrer chez eux alors que ceux qui travaillent, on ne va pas les renvoyer chez eux”, confondant, comme le note le journal local, couleur de peau et nationalité. Dans le département voisin de la Vienne, la candidate Hager Jacquemin, elle aussi, ne peut plus participer au débat en raison d'un test positif au Covid-19. Pourtant, la candidate a été prise en photo, non masquée, lors d'une réunion publique jeudi soir, a noté France Bleu Poitou.

Dans les Pyrénées-Atlantiques, Serge Rosso candidat RN de la 5e circonscription, a, lui aussi, annulé sa venue au débat prévu ce mercredi matin. Il a envoyé un message à la rédaction de France Bleu Pays Basque dans la nuit, indiquant qu'il était indisposé pour "raisons médicales". En Lorraine, Marie-Claude Voinçon, candidate RN de la deuxième circonscription de Moselle, a indiqué son indisponibilité, se disant souffrante. Elle a en revanche proposé que son suppléant participe au débat à sa place. Ce à quoi le député sortant Ludovic Mendes (Renaissance) a répondu qu'il refusait de débattre avec un suppléant et a proposé d'envoyer lui aussi son suppléant. France 3, qui diffuse le débat conjointement avec France Bleu Lorraine Nord, a décidé d'annuler le débat.

Le "terrain" privilégié, des invitations qui restent sans réponse

En Isère, Frédérique Schreiber préfère "donner la priorité à sa présence sur le terrain" tout comme Denis Kieffer dans le Bas-Rhin. La députée sortante Mathilde Paris, de la 3e circonscription du Loiret, a accepté l’idée d’un débat puis a finalement refusé ce mardi, car les thèmes ne lui plaisaient pas.

Dans les Bouches-du-Rhône, Gérault Verny, candidat RN de la 14e circonscription, a annulé sa venue au débat organisé par France Bleu Provence et France 3 Provence-Alpes-Côte-d'Azur ce mercredi à la mi-journée. L'enregistrement était prévu à 16h30. Le candidat n'a pas donné d'explications. En Alsace, Christelle Ritz et Christian Zimmermann n’ont jamais répondu à France Bleu.

Des candidats sans expérience ?

Certains candidats RN aux législatives anticipées sont des novices en politique. Les arguments avancés sont-ils des prétextes permettant d’échapper à cet exercice périlleux du débat ? Un responsable du RN a notamment confié à la rédaction de France Bleu Gascogne que la candidate Véronique Fossey était en réalité effrayée de débattre en direct à la radio. Il faut dire que des extraits des débats des législatives organisés sur France 3, diffusés sur les réseaux sociaux, montrent parfois des candidats inexpérimentés ou en manque de maitrise sur certains dossiers.

"On a conscience qu’ils n’ont pas été formés à la prise de parole", a reconnu, sous couvert d'anonymat, un cadre au siège du parti à franceinfo. Ce n'est pas en 15 jours de campagne qu’on a pu organiser des media trainings (formation aux médias, ndlr). Ce proche de Marine Le Pen estime que leur refus est "raisonnable". "Peut-être qu’ils se disent en effet qu’ils ne sont pas prêts", a-t-il poursuivi.

Journaliste à France Bleu Provence, Frédéric Chapuis explique que le Rassemblement national dans son département a l'habitude de pratiquer "la sobriété médiatique, c'est-à-dire de peu s'exposer dans les médias. C'est "une pratique dite et assumée chez nous dans les Bouches-du-Rhône par le RN", indique-t-il. "Tous les candidats des circonscriptions sollicités ont sciemment refusé de répondre à nos questions et/ou invitations", explique le journaliste. Ces candidats renvoyaient systématiquement vers un cadre local du parti, rompu à l’exercice. "Ce n'est pas parce qu'on n'est pas une bête médiatique, qui enchaîne dix plateaux de télé par jour, qu'on est une mauvaise personne ou qu'on n'est pas sincère, a répondu Jordan Bardella, invité de France Bleu ce mercredi. Nos candidats connaissent la réalité de ce que vivent des Français."

Le parti assure ne pas donner de directive

La direction du parti a-t-elle demandé à ses candidats moins expérimentés de ne pas s'exposer avant le second tour ? Souhaite-t-elle empêcher des dérapages ou des réponses maladroites lors de ces débats ? Le cadre du parti interrogé par franceinfo assure qu'il n'a pas connaissance de directives du parti émanant de la direction du parti d'extrême droite. "Il a été laissé libre choix aux candidats d'y aller ou non", nous a assuré de son côté Victor Chabert, le directeur du service presse du RN. "Cela m'est arrivé de ne pas répondre à des sollicitations médiatiques", a ajouté le patron du RN sur France Bleu.

L'absence de certains candidats RN aux débats de France Bleu a fait réagir l'ONG Reporters sans frontières ce mercredi. Dans un message publié sur X, RSF estime que ces candidats "se soustraient ainsi au droit à l'information des citoyens avant un scrutin décisif pour la France".

Dans un communiqué, SOS Racisme dénonce aussices refus et pointe "la stratégie d'évitement systématique" du RN. L'association estime que "cette attitude [...] révèle une volonté d'éviter les 'dérapages' et démontre l'imposture et la dangerosité du programme du RN ainsi que l'incompétence de ses candidats". "La confrontation dans des débats publics mettrait en lumière ses véritables positions : antidémocratiques, racistes, antisémites, homophobes et sexistes", juge encore SOS Racisme.

Annulations chez des députés LR et NFP également

Le RN n'est pas le seul parti concerné par ces annulations au dernier moment. En Isère, Yannick Neuder, candidat Républicain de la 7e circonscription, a indiqué à France Bleu Isère ne pas vouloir débattre contre son adversaire de l'extrême droite.

Dans la Loire, deux députés sortants LR ont décliné les propositions de débat de France Bleu Saint-Etienne Loire, officiellement pour des raisons d'emploi du temps. Dans la 2e circonscription des Deux-Sèvres, Delphine Batho (Nouveau Front populaire) a décliné le débat avec la candidate Rassemblement national sur France Bleu Poitou. "Si je dois débattre, c'est avec monsieur Bardella", a-t-elle répondu, car c'est lui qui apparait sur les professions de foi.

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