Le remplissage d’un réservoir d’essence s’apparente généralement à un pit-stop de Formule 1 : on cherche à aller au plus vite, sans aucune distraction. Ce n'est pas le cas pour le plein d’une batterie, qui impose un temps d’arrêt plus long, notamment sur autoroute. À moins de s’enfermer dans sa voiture, sans jamais se préoccuper des autres, ces pauses recharge permettent de rencontrer et d’échanger avec de parfaits inconnus. C’est finalement un drôle de mélange entre une application de rencontre, où l’on swipe au bout de quelques minutes et le bistrot du coin. Sauf que le comptoir est remplacé par une série de bornes de recharge autour desquelles les conducteurs échangent leur expérience de la voiture électrique.
En quatre recharges sur des bornes rapides la semaine passée, j’ai rencontré quatre hommes différents, tous quinquagénaires. Ce n’est ni la voiture (une DS3 rouge), ni sa conductrice, qui ont été au cœur des échanges, mais bien les histoires de charge. Face à une borne un peu récalcitrante à se lancer, le premier est venu me proposer de l'aide. Il s'en est ensuivi des échanges très variés pendant une vingtaine de minutes. Un peu d’entraide et de bienveillance sont toujours appréciables — quelque chose qui s’est pourtant perdu au fil des décennies avec l’automobile.
Lors d’une autre session de recharge sur autoroute, c’est un motard curieux qui s’est approché pour s’enquérir d’informations sur le coût au 100 km des voitures électriques. Un sujet qui nécessiterait bien plus que 15 minutes d’échanges à la volée, tant la réponse n’est en rien évidente. Dès mes premiers essais de Tesla, j’ai souvent été questionnée au détour de bornes de recharge sur la voiture électrique.
C’est aussi pour comparer les puissances de recharge avec un Skoda Enyaq, sur une station Total Energies, que quelques mots ont été échangés avec un père de famille hollandais. Il revenait, avec sa famille, d’un long périple en France, où il a bien apprécié le développement du réseau de recharge par rapport à d’autres de ses destinations récentes (notamment en Italie).
Enfin, c’était aussi la rencontre avec cet homme en déplacement pour le travail, en Peugeot e-Expert, qui avait un itinéraire quasi identique au mien. Je l'ai surpris, grimaçant lorsqu’il s’est rendu compte que les deux seules bornes rapides étaient déjà prises et qu’il aurait à se brancher sur une borne de 50 kW. Cela m'avait permis de briser la glace. Vu que son modèle partageait la même base technique que la DS3, les échanges ont été nombreux sur les consommations et les recharges. Qui dit plateforme identique, dit aussi rendez-vous à la même borne pour la recharge suivante. Après une heure de route, c'étaient de nouveau les retrouvailles et la poursuite de la discussion précédente sous l’auvent d'une station Fastned.
Les différentes rencontres soulignent plusieurs constats partagés par plusieurs automobilistes. Les bornes restent une loterie sur le fonctionnement et la puissance de charge. Les pauses régulières, imposées par la batterie sur autoroute, cassent l’effet somnolence du trajet. Les auvents sont appréciés pour rester à l’abri sans avoir à se réfugier (seul) dans sa voiture. Enfin, l’électrique reste encore un peu l’aventure, mais bien moins que les années passées. Ces bavardages m’auront fait perdre 30 minutes de plus que prévu sur mon trajet, mais ces rencontres furent bien plus enrichissantes que celles d’un site de rencontres.